Agde - poésies
Mont Saint Loup
Que racontent les pierres aux vagues empressées ?
Peut-être le chaos d'un volcan endormi :
Des forges de Vulcain, maintenant refroidies ;
Un brasier minéral, tragédie effacée,
Quand le mont, éructant sa chaleur diabolique,
Vomissait ses entrailles. La lande caillassée
Croulait sous le basalte, les cendres bénéfiques
Sous le regard blasé d'un ciel incandescent.
Et les flots bouillonnant de lave, impuissants,
D'écume recouvraient le magma volcanique.
Nina Padilha © 28/06/2014
Du balcon aux tisons
Je ne prête pas d'attention
Aux heures qui, doucement, passent.
J'écris des mots sans prétention
Où je traine sur la terrasse…
Le seul qui a tous mes regards
C'est bien ce sacré thermomètre !
Cette saison est trop bizarre :
Le printemps ne veut pas paraître !
Il s'est, sûrement, égaré
Au point vernal de l'équinoxe
Et n'a pas su se repérer…
D'où cet étrange paradoxe :
Le mois de mars presque fini
Voit la fraîcheur qui s'éternise.
Persistent les frimas honnis
Éole n'offre que la bise.
Pourtant les oiseaux migrateurs
Sont revenus pour nidifier
Et les bourgeons sont prometteurs…
Les prévisions sont modifiées ?
Décembre aux jours si aimables…
Les dictons ont parfois raison !
Si le solstice est charitable
Ostara donne des tisons.
Nina Padilha © 31/03/2013
Complainte de l'huître
Dans le bassin de Thau, j'étais simple naissain
Balloté par les flots, j'ignorais les desseins
De ceux qui, bien souvent, venaient me visiter,
Admirer ma croissance et s'en féliciter.
Ma vie était tranquille et, plongé dans ces ondes,
J'ai grossi à vue d'œil, fortifiant ma coquille.
Je suis devenu huître, en ces eaux peu profondes,
Qui abritait mes rêves et ceux de ma famille.
Une rumeur, pourtant, venait nous alerter,
Qui parlait de razzia et de quoi s'inquiéter :
Notre berceau liquide était sous surveillance,
Négoce lucratif, fraîcheur et succulence.
Car les humains seraient friands de coquillages,
Nous auraient parquées là, juste pour les servir
Et l'ostréiculture n'était qu'un élevage :
A la fin de l'année, nous allions tous périr.
Serrées dans des bourriches, déposées sur la glace,
Nous sommes emportées vers l'appétit vorace
De ceux qui nous couvaient. Nos vies sont en danger :
Avec d'autres consœurs, je vais être mangée !
Nina Padilha © 03/12/2012
Aubes d'hiver
Le ciel de ces jours-ci, toujours emmitouflé
Dans de grosses nuées que le vent a soufflées,
A engourdi ma plume et lesté ma mémoire.
Je serre mes écrits pour encor' un grimoire
Où je note des vers, titubants de fatigue,
Quand l'aurore jaillit dénonçant les intrigues
D'un Morphée facétieux qui écourte mes songes.
Quel sera mon repos dans les jours qui s'allongent ?
Quand Yule s'en viendra, au solstice d'hiver,
Mon cœur, au ralenti, biaisera ces revers
En captant, librement, l'incroyable lumière.
La vie au quotidien déroulant ses possibles
Attifés de soleil, aux fraîcheurs indicibles,
Gracieusement s'éclaire dans ces heures premières.
Nina Padilha © 04/12/2013
Dans le vent...
Narines dilatées, j'ai fait face aux rafales
Comme font les chevaux, quand souffle la tempête.
J'ai respiré la mer
Qui lâchait ses embruns depuis le littoral
Et soudain j'ai envié la liberté des mouettes,
Leurs ailes de lumière…
Et le vent me giflait, décoiffait mes cheveux ;
Je humais son parfum, avec le cœur battant.
Ce petit goût de sel.
Au bord de l'infini, j'ai pu toucher les cieux,
Ouatés et chahutés par l'humide printemps
Dénué d'arc en ciel.
Un long moment d'ivresse, étrange plénitude,
Grisantes sensations qui animaient mon cœur :
Un avatar d'orage
Où des anges riants perdaient de l'altitude
Et venaient me convier à entrer dans un chœur
Mystique et sauvage.
Nina Padilha © 01/05/2012